Tournée festival

  "… Il serait temps d'aborder les choses qui fâchent. Le groupe a commis quelques erreurs plus ou moins graves. Celle-ci a bien failli coûter la peau du groupe. À force de tourner sans arrêt, LA JUNGRA a rencontré pas mal d'autres groupes sur le circuit de la winne. Certains collègues étaient infréquentables our toutes sortes de raisons, mais d'autres étaient très sympathiques et le groupe avait grand plaisir à les fréquenter. De notoriété équivalente, quelques groupes se retrouvaient parfois en première partie de LA JUNGRA, parfois ce fut le contraire. Entre amis, pas de rivalité ni d'animosité, bien au contraire, juste un nouveau prétexte à rire ensemble tout en se taquinant. Toujours est-il qu'une idée issue d'une beuverie collective finit par faire son chemin dans la tête des managers respectifs. En se groupant, ils montèrent une tournée collective. Quatre groupes, les mêmes techniciens pour tous, un matos de sonorisation et de lumières permanent : le cirque Rock'n'Roll était né. Inutile de dire que les musiciens débordaient tous d'enthousiasme. Particulièrement les batteurs qui voyaient là l'occasion de pouvoir discuter technique avec des gens de leurs niveaux. Généralement, mis à part peut-être les bassistes un peu dans le même cas, les autres musiciens considérant la batterie comme un non-instrument, les batteurs se sentent bien malheureux et c'est ainsi qu'à maintes occasions, on a pu constater un certain alcoolisme chez ces instrumentistes déprimés. Bref, très rapidement une vingtaine de dates plutôt rapprochées furent signées et la caravane de la fiesta du Rock prit la route. L'ordre de passage étant tournant, le show se déroula à merveille. Le succès était là. Dans une grande tolérance, les publics de chaque formation appréciaient toute la soirée proposée. On refusa du monde à toutes les dates. Backstage, dans un premier temps, la fête était totale. Bien sûr, il fallait canaliser les groupies et les partager équitablement, mais les managers géraient ça à merveille. La tension dévastatrice, au début, ne s'est pas faite sentir, pernicieuse, elle montait progressivement sans trop se faire remarquer. Ça jasait pas mal entre collègues, ce qui reste un paradoxe dans le milieu du rock. Finalement, la tension sauta aux yeux de tout le monde. Pour une fois réunis et aussi unis, les batteurs critiquaient ouvertement les bassistes, jamais assez précis pour eux. Le bassiste des  TROUDUCS frappa le batteur de LA JUNGRA pour une histoire de contre-temps controversé. Pour l'un, le contre-temps devait arriver un peu plus tôt ; pour l'autre, un peu plus tard. La discussion qui s'ensuivit dressa la bande des batteurs contre celle des bassistes. Même les choristes n'arrivèrent pas à rétablir la paix. La tournée fut annulée. Dorénavant, les groupes évitèrent de se retrouver sur les mêmes affiches. Parfois, histoire de discuter tranquille, certains chanteurs se voyaient en cachette… "


Extrait de “Histoire de LA JUNGRA" - Éditions des Lettres & Rock - Dépôt légal : 09/2038



Variété

 "… Le succès appelle le succès. Au troisième disque, celui-ci commença à stagner. Jusque là, chaque nouvel album pulvérisait le record de vente du précédent. Était-ce que la jauge d'amateurs était au maximum ? Qu'il n'y avait plus moyen de séduire un nouveau public ? Malgré le sommet qu'avait atteint LA JUNGRA, les membres du groupe n'acceptaient que difficilement cet état de fait. La remise en question était sur la table. Après plusieurs discussions animées, il fut décidé qu'il était dorénavant temps d'abandonner le rock pour glisser progressivement vers une variété alternative. Il fallait marcher sur des œufs. Séduire de nouveaux tout en gardant les anciens. Curieusement, alors que le groupe se dirigeait vers une normalisation musicale, une simplification plus populaire, c'est à la même période que les musiciens expérimentèrent toutes sortes de drogues. Toujours défoncés, ils se mirent à produire des morceaux simples et pourtant psychédéliques. Le producteur s'arrachait les quelques cheveux qui lui restaient. Il fallut beaucoup d'astuce pour bricoler en studio des morceaux moins longs pour passer à la radio tout en gardant une certaine cohérence sonore. Couper par ci par là, ralentir ou accélérer, harmoniser le tout, ajouter quelques nappes de clavier, mixer proprement : l'ingénieur du son a fait des prouesses. Bien sûr, coupés dans la bataille, les textes devinrent encore plus incompréhensibles qu'avant. Le succès tout d'abord critique fut immense. La presse unanime salua l'inventivité sans cesse renouvelée du groupe. La musique déconstruite, les arrangements innovants et les textes défiants autant la grammaire que le besoin de sens ; tout cela fascina une presse toujours en mal de nouveautés. Elle baptisa ce nouveau genre musical le "Cut-Up Pop Psyché". Malgré cet intellectualisme, le public adora le disque. Durant vingt mois, l'album fut en tête de tous les classements. L'argent coulait à flot. Après quelques soucis de santé dus aux abus, les musiciens firent une cure dans une fameuse clinique suisse (adresse disponible sur simple demande). À leur retour, ils avaient arrêter provisoirement la drogue. La tournée pouvait alors commencer… "


Extrait de “Histoire de LA JUNGRA" - Éditions des Lettres & Rock - Dépôt légal : 09/2038



Tournée des bars

 "… Fort d'un énorme succès bien mérité, le groupe choisit de tenter une expérience exceptionnelle pour l'année 2023. Pour une fois (et ce fut la seule), l'idée venait du batteur et du bassiste. Généralement, lorsqu'il était question d'innover, ils préféraient écouter les autres réfléchir et approuver les choix, sauf lorsqu'ils estimaient que la nouveauté les amenerait à faire trop de terribles efforts supplémentaires. Curieusement, bloquer six mois pour faire un concert dans un bar tous les deux jours ne semblait pas demander d'efforts supplémentaires pour eux, bien au contraire. On ne les avait jamais vu aussi enthousiastes. Après quelques discussions, le projet fut validé. Le tour de France plutôt facile à mettre en place, les presque cent dates furent bookées rapidement. À l'usage, tout s'avéra plus compliqué que prévu. Heureusement que les distances entre deux dates étaient assez courtes, les pauses vomis furent moins nombreuses. Le premier mois, la section rythmique réussissait à se remettre avant le concert suivant. À mi-parcours, ce n'était plus le cas. Nos deux compères finirent même par regretter d'avoir mis dans le contrat l'obligation de "bières illimitées". Bien sûr, personne ne les obligeait à s'enfiler canette sur canette du début de la balance au chargement du matos, mais le rock'n'roll sera toujours vainqueur. Je vous ferai grâce des mille anecdotes arrivées durant ces six mois, un livre n'y suffirait pas. Toujours est-il qu'après cette fameuse tournée, un repos de trois mois ne fut pas suffisant à nos deux lascars pour retrouver une santé physique telle qu'en partant. Pour ce qui est de la santé mentale, chacun fut étonné qu'elle ait pu se dégrader. L'année suivante, c'est la section rythmique qui refusa catégoriquement de réitérer l'expérience…"

Extrait de “Histoire de LA JUNGRA" - Éditions des Lettres & Rock - Dépôt légal : 09/2038



La carrière solo de Kevin !

“ … Le succès grandissant, il arrive parfois que les têtes gonflent. C’est bien normal. Après tout, comment vraiment savoir à qui on doit la...